doublestory 25

Histoire de Caroline

Tous les étés depuis mon enfance, je suis allée en vacances dans la région d’origine de mon père. Après des heures de route, ponctuées de quelques arrêts stratégiques pour avaler un sandwich ou acheter une cagette de raisins que nous offririons, surgissaient tout à coup, au détour d’un virage, les tours et le clocher médiéval qui annonçaient notre arrivée. Nous garions notre caravane au camping, moulus par le voyage, puis foncions à la ferme des grands parents, dite Le Bancarel, en passant par une par une croix de pierre où il était assise la même vieille sorcière que l’année précédente. Pour moi, cette escapade estivale ressemblait à une pause hors du présent. Les vieilles pierres de schiste ou de granit, les toits noirs, les vallées et le meuglement des vaches : une barrière invisible séparait mon quotidien de Provence de ce pays encore vierge et peu accessible par les grandes routes.
C’était la liberté, parfois teintée d’un léger ennui, souvent de tendresse, et lorsque j’y retourne, j’ai l’impression de me balancer dans une autre dimension du temps.